Mon incroyable vie de prof

Je suis petite, brune, les cheveux souvent attachés en queue de cheval pour ne pas dire « toujours ». Je n’apprécie guère les laisser détachés en particulier en période de canicule, j’ai trop chaud.

Depuis le covid, je n’ai pas quitté le masque.

Je ne me considère comme ni mince, ni grosse, mais il vrai que depuis quelques mois, mon ventre a changé de forme et pour une raison toute simple… Il est vrai également qu’il se voit plutôt bien. Il est aussi vrai que depuis quelque temps, pour cause de chaleur ou bien parce que je dors peu les nuits, j’ai tendance à être fatiguée. Apparemment, mes élèves l’ont remarqué et ils ont une manière propre à eux de me le montrer. À ce point, c’est un peu vexant.

Vous vous demandez sans doute chers lecteurs les raisons qui me poussent à rédiger mon portrait ?

Vous allez comprendre en lisant la suite de cette anecdote. Tout est parti d’un « Dessiner, c’est gagné ! »

Fin de l’année scolaire. Aucune épreuve ponctuelle en anglais pour le brevet. Que voulez-vous faire avec des élèves qui n’ont aucune passion pour cette langue et qui n’ont qu’une envie, jouer ? C’est ma réalité. Il ne reste que trois heures de cours avec eux. Forcément, je cède. Je concocte quelques jeux. Dans la langue de Shakespeare s’il vous plaît. Quoiqu’en pensent les jeunes chenapans, on peut s’amuser en anglais et apprendre tout à la fois.

La première activité consiste à réviser les métiers que nous avons étudiés la veille. Petite correction qui prend plus de temps que prévu. Puis je lance un « Dessiner , c’est gagné. » Ce n’est pas la première fois que j’utilise ce jeu avec eux. Ils l’aiment bien, pour ne pas dire qu’ils adorent. Je suis plutôt confiante. Tout se passera bien.

Je rappelle les règles :

« Vous devez reproduire un emploi que l’on vient de voir. Celui qui trouve la réponse gagne ».

Un apprenant passe au tableau, puis un second. Au troisième, revirement de situation ! Le garnement se met à représenter un de ses camarades, ce qui donne envie à Paulo de venir à son tour. Dessiner un métier ? Non merci. Les amis ou les enseignants sont nettement mieux. Le jeune Van Gogh commence par réaliser le portrait de Ludo, le boulanger de la classe. Ensuite, celui de Dom, l’AESH qui accompagne le petit Kiki. Enfin, le meilleur pour la fin :

«Madame, je vais vous dessiner ! » Attention les yeux.

De petite taille avec une queue de cheval, des membres assez disproportionnés. Je mets mes lunettes pour mieux contempler le chef d’oeuvre.

« Ah non-Madame, pas vos lunettes. Je devrais ajouter un élément. »

Soit, je les pose. Van Gogh a parlé. Je ne suis pas au bout de mes surprises.

« Ah , j’allais oublier. Vos cernes ». Le Paulo trace deux petits traits en -dessous de mes yeux.

Dom rit aux éclats, quant à moi, je secoue la tête de gauche à droite. Mes élèves sont gentils, mais peuvent être vexants par moment. Merci pour les cernes Paulo la fripouille. Fin du cours. La cloche sonne l’heure de la récréation. Jojo, pour ne pas être en reste, finalise mon portrait.

« Il manque votre gros bidon et votre sac. »

Merci Jojo ! Quel détail important, mais je ne lui en veux pas. Au contraire, j’immortalise cet art qui fera sourire les collègues et je l’espère, les lecteurs.